Discovery Mountain Origins

Il y a vingt ans, en 1995, les visiteurs de Disneyland Paris allaient découvrir d’ici quelques semaines Space Mountain : De la Terre à la Lune, une aventure inspirée du célèbre roman de Jules Verne dans laquelle musique symphonique et décors victoriens plongeaient les voyageurs au cœur d’une attraction respectant parfaitement le thème de Discoveryland.

Nous vous proposons sans plus attendre de revivre le voyage original en découvrant le superbe projet hommage réalisé par Grégory Noacco, Discovery Mountain Origins !

Vous avez effectué un bon voyage ? Si vous souhaitez maintenant découvrir les coulisses de ce projet, nous vous proposons de prolonger l’aventure en découvrant l’interview de Grégory réalisée par Guillaume Cardon pour le site disneygazette.fr:

Grégory, tu es le créateur et l’animateur à l’origine de la vidéo « Discovery Mountain Origins ». Pourquoi un tel projet et pourquoi l’avoir nommé « Discovery Mountain Origins » ?

Il y’a 2 raisons, une officielle et une plus officieuse. L’officielle, c’est bien évidemment la rumeur d’un « Space Mountain » remis à jour pour 2015. Quelque temps après Star Tours Origins, mon logiciel de modélisation 3D a expiré. J’en ai profité pour changer d’outil, et découvrir « Blender ». Bien évidemment, qui dit nouveau logiciel dit perte des repères: j’ai donc du tout ré­apprendre, en utilisant ce projet/attraction comme test.
C’est un peu comme le bateau de Gibbs (NDLR : Personnage de la série « NCIS», qu’il entretient sans jamais le sortir !). Je me suis formé à “Blender” en bichonnant cette modélisation pendant 2 ans, mais sans vraiment concrétiser la chose, un amusement plus qu’autre chose. Et un jour, la rumeur est arrivée, couplée avec les 150 ans de l’ouvrage “De La Terre A La Lune” duquel tout est parti…
Pour le nom du projet, il y a une raison plus particulière: quand je pense à « Space Mountain», je pense aux bâtiments blancs emblématiques des Tomorrowlands des autres parcs; Pour moi notre version n’est pas un « Space Mountain » à proprement parler. Et comme j’essaie de modéliser les attractions comme elles étaient initialement conçues, j’ai décidé de la nommer comme prévu 2 semaines avant l’ouverture en 1995 : Discovery Mountain. Et « Origins » pour être dans la continuité de mes réalisations (NDLR : Grégory est l’auteur de la réalisation « Star Tours Origins »).
La raison officieuse, c’est suite à ce qu’il s’est passé sur Star Tours Origins. En résumé, je pensais que cet hommage “fait maison” réalisé pendant plus de 7 mois aurait pu rester en ligne, voire même naïvement, ferait un peu de pub pour Disney. Mais la suite m’a vite ramené sur terre. Tant pis, je procède donc différemment cette fois-­ci…

Racontes-­nous comment s’est déroulé le projet. Par quoi as­-tu commencé, quel était le premier élément que tu as modélisé ?

Comme je l’ai mentionné, je découvrais un tout nouveau logiciel de modélisation, par conséquent, pour paraphraser un cher robot disparu : « Et voila: retour à la case départ ! » Le premier élément, l’un des plus simples à réaliser et qui me permettait de reprendre certaines marques, c’était la structure typique d’un rail Vekoma, en forme de « U ».

Ensuite, à la manière de ce qu’on peut faire sur NoLimits, j’ai tracé une courbe qui a servi de support au circuit, en me basant sur les plans. J’ai alors dupliqué cette forme tout le long de la courbe, pour que naissent ainsi les prémices du circuit de « Space Mountain ». Mais bien sûr, il restait ensuite à ajuster beaucoup de paramètres pour finaliser ce modèle, sans parler de l’animation en elle même…
Petite anecdote, l’ordinateur ayant un peu de mal à suivre, j’ai eu beaucoup de difficultés à avancer sur ce modèle du circuit. Aussi pour faciliter la conception, et tout simplement avoir une meilleure vision sur ce que j’étais en train de faire, je me suis inspiré du célèbre documentaire « Shoot for the Moon » dans lequel on voit quelques images d’une modélisation du circuit (des années 90 !), avec un rail rouge et un rail vert. Et cette idée toute bête m’a permis d’avancer beaucoup plus vite dans la réalisation !

As-­tu rencontré des difficultés en particulier dans cette réalisation ?

Les objets / formes que l’on voit dans la modélisation sont à 95% construites à partir de 3 formes de base : des cubes, des sphères, des cylindres. Elles sont bien évidemment ensuite modifiées pour obtenir les objets voulus: même pour un bâtiment de 60m de diagonale, ce n’est qu’une question d’échelle !
Ainsi, hormis l’optimisation du modèle (choisir entre avoir beaucoup de détails, ou calculer les images plus rapidement), et l’animation (train, effets…) réalisée manuellement, il n’y a donc pas de grosses difficultés techniques… Mais c’est très chronophage !

La principale difficulté pour ce projet, c’est le manque de documentation. C’est très facile en 2014 de capturer des photos de 4 mega pixels, des vidéos HD, etc… Mais à la fin des années 90, c’était une autre paire de manches ! Il fallait avoir du matériel (cher)… Le monter à bord d’une montagne russe… Exporter la vidéo sur son ordinateur… Pour la charger bien plus tard (et lentement) sur Internet ! Ce n’était pas un réflexe comme actuellement ce qu’on retrouve sur les réseaux sociaux, à poster facilement des photos de son chat ;­) …
L’avantage d’avoir eu « Mission 2 », c’est que les photos/vidéos sont faciles à trouver puisque c’est un projet plus récent… Et que factuellement, « De la Terre à la Lune » et « Mission 2 » sont assez proches hormis la musique et la décoration…
Donc travailler avec des photos en basse définition, des bouts de schémas à peine lisibles… c’était ça le principal problème !

Quels sont les éléments que tu juges perfectibles ?

Il y’en a évidemment plusieurs, mais le principal reste une partie du circuit qui contient une erreur qui ne pouvait plus être retouchée quand je m’en suis rendu compte.
Instant “Michel et Michel”: Les personnes qui pousseront la luminosité au maximum ne seront pas déçues puisque non seulement le circuit est représenté, mais les pylônes, chemins d’évacuations, filets de sécurité, caméras, sont présents et les plus attentifs verront l’erreur ! Le plan que j’ai utilisé pour reconstruire l’attraction est un plan “vu du dessus”, trouvé sur le célèbre site « FeLIX’ Space Mountain Fan Pages ». Mais bien évidemment, le problème étant qu’il n’y a aucune indication concernant les hauteurs, il y a un endroit en sortie de vrille où mon circuit passe en dessous de la file d’attente, alors qu’il passe au­ dessus dans la réalité… Après l’autre point gênant, c’est d’avoir ma tête dans le « Safety Warning » (pas eu le choix, la vidéo originale ne pouvant être retrouvée à temps). Mais c’est une appréciation personnelle…

Combien de versions pour en arriver au résultat final ?

Le modèle source (le fichier qui contient tous les éléments) existe en 10 versions. J’incrémente le numéro de version lorsque j’effectue de grosses modifications dans le modèle, histoire de pouvoir le différencier des anciennes versions sauvegardées (un peu à la manière des mises à jour de logiciels !)…
Les exports vidéo quant à eux ont commencé assez tôt, et c’est actuellement le 32ème.
A titre d’exemple, le projet « Star Tours Origins » a eu 63 exports vidéos avant d’arriver à la version finale, publiée… avant d’être retirée.

Combien de temps pour un export vidéo ?

L’export de la vidéo montée, proprement dit, est très rapide en fait (une vingtaine de minutes)… Par contre ce qui est le plus long, c’est ce que toute personne qui a touché un logiciel de 3D connaît et haït: le Rendu ! Il s’agit du calcul image par image intégrant les lumières, ombres, réflexions…Sur “Discovery Mountain Origins”, chacune de ces images prend en moyenne 6 minutes à calculer. Il y’a 7000 images pour la vidéo 2D, et donc 14 000 pour la version 3D… (Oui, c’est un vrai rendu 3D et non pas une simple conversion dont certains studios de cinémas sont friands !)

Sur la vidéo, les plus attentifs auront remarqué des « originalités », par exemple le remplacement des Cast members par des « Space Invaders », pourquoi ?

C’est un clin d’oeil à une de mes occupations précédentes. J’étais réalisateur de clips 3D (parallèlement à mes études en management), et je travaillais avec le DJ/Producteur Joachim Garraud.
Les Space Invaders étant son emblème, mon parti pris fut d’en faire un personnage récurrent et animé en 3D dans diverses situations à travers les clips… J’y suis donc assez attaché, car il symbolise un peu mes débuts dans la 3D. Dans Star Tours Origins ou Discovery Mountain Origins, chaque personne humaine est donc remplacée par un Space Invader… ou un petit caméo de 9­Eyes !

D’ailleurs dans le même esprit que cette 9­Eyes qu’on voit dans la tour de contrôle, est­-ce qu’il y a d’autres clins d’œil dans la vidéo ?

Hormis l’affiche du Visionarium dans la tour, il n’y en a pas tellement dans celle-­là (il y en avait un peu plus dans Star Tours Origins). Ici, la majorité se trouve dans le plafond de la « Gun Room ».

On ne voit pas tous les noms dans la vidéo, mais il y a par exemple « MK­555 » pour Magic Kingdom, ouvert en Mai 1955, « DLP­92 », un classique, « GN­688 » parce que bon, on est jamais mieux servi que par soi­-même, « DM­193 », un ami qui m’a apporté énormément d’informations sur le sujet (ça aide pour certains détails), et bien évidemment, le « TD­748 » du maître !

Alors puisque tu parles de Tim Delaney, la figure emblématique de l’attraction, est­-ce qu’il est au courant de ta réalisation ?

Et bien oui ! Cela me tenait à cœur de lui faire découvrir, car il fait parti des créatifs de l’ombre. Que ce soit sur « Star Tours » ou sur « Space Mountain », ils sont méconnus du grand public (encore que sur cette dernière, ils ont le « luxe » d’avoir leurs initiales sur le plafond de la salle « Gun Room »). Quand on voit la liste de noms interminable à la fin des films, la moindre des choses était de les créditer eux aussi dans un générique. Je l’ai contacté, non pas pour me mettre en valeur, mais pour qu’il sache que son travail reste toujours très apprécié dans sa version originale. C’est un humble hommage pour leur montrer qu’ils ont marqué l’Histoire, pas comme certains grands noms célèbres, mais une
Histoire que nous connaissons et qui continue de nous toucher.
Je ne m’attendais pas à une réponse, mais il a répondu ! Et après avoir échangé un peu avec lui, il souhaitait partager cette vidéo avec le reste de l’équipe originale. Je me doute que je ne suis pas le seul à l’avoir contacté, mais le fait d’avoir entretenu cette brève correspondance avec lui m’a beaucoup touché !

Maintenant que Space Mountain « De la Terre à la Lune » a été remodélisé, sous le nom « Discovery Mountain Origins », as-­tu songé à refaire « Mission 2 » ?

Oui j’y ai pensé ! Et pour être honnête, au risque de me faire huer, les premiers tests de lumière que j’ai effectué dans le bâtiment principal étaient… les boules à facettes ! J’ai vu que j’étais capable de faire des choses à peu près correctes point de vue lumière, donc je me suis lancé en mettant au point les lampes noires…
Mission 2 est loin d’être une mauvaise attraction. La musique n’est pas mauvaise, mais tout comme Buzz, l’ensemble n’a pas grand chose à voir avec Discoveryland: l’esprit ne colle pas. Je ne fustige donc personne, c’est comme partout, des choix ont été faits pour mettre à jour l’existant et le résultat est celui­-ci.
J’avais même songé à proposer une sorte de choix, sur Youtube, où après l’arrivée sur le quai, la personne pouvait choisir entre deux vidéos, « De la Terre à la Lune » ou « Mission 2». Mais pour des raisons techniques, d’interopérabilité entre les différents systèmes existants (tablettes, smartphone, etc.) je n’ai finalement pas donné suite à cela.

Ensuite, pour Mission 2, il est aujourd’hui beaucoup plus simple de retrouver des documents de bonne qualité pour revivre l’expérience: les médias pour se rappeler de l’attraction sont là, donc peu d’intérêt à mes yeux de modifier/calculer mon modèle pour cette version.

D’accord, mais là c’est la « Mission 2 » telle qu’elle existe. Peut­-on envisager une création totalement originale comme « Space Mountain – Autour de la Lune ? », suite de la première version de l’attraction ?

Bien sûr, et pas parce que c’est la tienne ! (NDLR : Lien vers la Gazette d’Or du meilleur reportage ?).
J’ai beaucoup aimé le fait de garder une cohérence avec l’univers, d’avoir une continuité avec l’attraction originale, et aussi des détails comme l’idée d’avoir la photo on-ride incrustée sur un journal d’époque.
Même si « De La Terre A La Lune » était une excellente attraction, elle présentait tout de même quelques petites incohérences/anachronismes: les écrans TV dans la file d’attente, le «Safety Warning » (avec la célèbre Nicole), les chronomètres digitaux rouges sur les quais, etc. Cette autre version permettrait de continuer sur l’esprit du Gun Club, mais il reste un point essentiel, et bloquant à cette heure : La musique.
Comme pour la majorité des films, la musique est faite pour la séquence où elle est diffusée (et d’autant plus sur une montagne russe !). Il faudrait pouvoir produire une telle musique, spécifique à ce projet. Les moyens existent, il est facile de trouver des logiciels pour composer… Mais si quelqu’un a le talent pour refaire un morceau, inspiré des thèmes ou rythmes comme The Rocketeer, Star Wars, 20000 Lieues Sous Les Mers…
Pour « Mission 2 » Michael Giacchino a fait un pari: celui de coller une « bassline techno » derrière une partition jouée par un orchestre. Je trouve que c’est un excellent compositeur, j’ai aimé ce qu’il a fait sur le reboot Star Trek, j’ai adoré ses reprises des thèmes Star Wars que l’on entend dans la file de « Star Tours II ». Mais sur le morceau « Cloudy Day » qui sert de musique à « Mission 2 » il manque un petit quelque chose: un thème principal qu’on retienne !
Le morceau de Steve Bramson a un thème qui lui reste en tête. Quelques notes qui évoquent l’aventure, l’époque glorieuse des Visionnaires, les mystères des découvertes. Rien ne remplace cette montée musicale, ces roulements de tambours sans fin, qui retentissaient dans la Columbiad !
Si on trouve une musique pour illustrer le projet « Autour de la Lune », même en reprenant éventuellement des éléments du thème original de « Space Mountain – De la Terre à la Lune », et avec le temps, alors tout peut s’envisager ! Appel à tous ceux qui se sentent compositeurs dans l’âme !

Un dernier mot ? Un message à faire passer ?

Ce projet, je l’ai réalisé pour le fun. C’est un hommage à ceux qui sont restés dans l’ombre ou qui au mieux, auront un jour une fenêtre à leur nom sur Main Street, U.S.A.
Ils ont fait un travail qui dépasse de loin ce que peuvent faire certains parcs en posant juste une montagne russe, sans aucun développement autour.
Non si il doit y avoir un message, c’est de montrer qu’avec de la motivation et de la persévérance, on peut désormais réaliser des choses sympa: les outils et technologies sont matures et accessibles à tous. C’est tout du moins le message que j’essaie de faire passer à mes étudiants quand je leur montre ce type de projet en cours de TIC (Technologies de l’Information et de la Communication). J’ai tout appris sur le tas à titre personnel, alors imaginez ce que vous, vous pourriez faire si vous vous y mettez ! L’essentiel est de ne jamais perdre espoir face aux difficultés ou au temps qui passe: si quelque chose paraît trop compliqué, subdivisez le en tâches plus petites, et lancez­-vous…

Un grand merci à Grégory Noacco pour le temps à passer à répondre à ses questions !

Voyage en 360° - VR

Si vous souhaitez de nouveau partir pour la Lune et que vous avez le matériel nécessaire, sachez que l’aventure est également disponible en 360° :

Interview : Guillaume Cardon
Vidéo et Images : Grégory Noacco
Article : Disneygazette.fr

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